Tandis que le peloton commence à voir le bout du tunnel avec la sortie du Pot au Noir, le groupe de tête, à plus de vingt nœuds de moyenne, va très rapidement changer d’atmosphère, passant en quatre jours des chaleurs tropicales aux frimas austraux.
Ce douzième jour de mer annonce bien des conséquences sur la hiérarchie et sur le positionnement à moyen terme pour aborder la phase la plus longue, la plus dure, la plus importante du Vendée Globe : l’entrée dans les mers du Sud. Avec 484 milles au compteur en 24 heures, Alex Thomson (Hugo Boss) reste le plus véloce et creuse ainsi l’écart sur Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII), malgré 431 milles avalés en 24 heures, qui est désormais en ballottage avec Sébastien Josse. Positionné plus au large des côtes brésiliennes, le skipper de Edmond de Rothschild a en effet pu accélérer.
Mais cette navigation n’est pas confortable pour autant. Le fait de naviguer pied au plancher demande beaucoup d’attention et génère de la fatigue, comme l’a expliqué Josse à la mi-journée: La mer n’est pas un billard, le bateau ricoche. A bord, on a du mal à se déplacer. Quand les bateaux dépassent 18-19 noeuds, c’est invivable. C’est bruyant, ça secoue, c’est humide. Cette nuit je n’ai pas pu dormir car il y avait de la houle de face.
Le vent va tourner progressivement au nord au cours des deux prochains jours en se renforçant et les trajectoires vont s’incurver vers le sud-est. Thomson et Le Cléac’h ont opté pour une route plus à l’ouest que Josse, qui a choisi de couper par l’est. Vincent Riou (PRB) et Paul Meilhat (SMA) sont sur une trajectoire médiane. Illustration d’un dilemme bien connu dans la course au large: aller vite en faisant plus de milles ou choisir une route plus courte en prenant le risque d’aller moins vite. Ce n’est pas encore gagné pour attraper la dépression qui sort du Brésil : il faut que je réfléchisse à d’autres scénarios si ça ne se passe pas comme prévu, estime Paul Meilhat. Les conditions sont favorables aux bateaux de tête. Physiquement, tout va très bien même si c’est un peu frustrant de perdre du terrain sur les foilers, mais je le savais après les entraînements que nous avons faits ensemble en Bretagne. Il faut rester patient : il y aura des coups à faire plus tard. Si tout va bien, les premiers bateaux pourraient franchir le cap de Bonne Espérance (Afrique du Sud) dans huit jours.