18 après, la victoire d’Arnaud Boetsch sur Niklas Kulti lors du cinquième match décisif reste encore dans toutes les mémoires. En apportant le troisième point à l’équipe de France face à la Suède, après avoir sauvé trois balles, il allait devenir le héros de Malmö. Vainqueur également du Saladier d’argent en 1991 (sans avoir joué), il évoque ses souvenirs…
Limage marquante de cette finale 1996
Cest le moment où toute léquipe court vers moi après la balle de match victorieuse. Cest un moment inoubliable. On sest tous embrassés. Cest la fin dune magnifique aventure après toute la préparation, le doute, le stress, la difficulté
Cétait un week-end plein démotions.
Lavant-finale et lesprit « commando » du stage de préparation
On était tous concernés par cette finale de Coupe Davis. On avait senti la pression monter quelques semaines avant. Du matin au soir, elle était toujours présente. A lentraînement, sur toutes les balles que je frappais, je pensais constamment à cette finale. On faisait attention à tout, à ce que lon mangeait, notre état de forme, les temps de repos. Je me rappelle que tous les matches que jai joués avant la finale ne servaient quà se préparer à cet événement. Ils me permettaient de me rassurer, de gagner de la confiance pour être prêt le jour J. Pendant le stade de préparation, il régnait vraiment un esprit commando. On se préparait à la guerre ensemble. Comme on savait que la difficulté allait être grande, on se préparait en fonction. La philosophie était de se dire que si on devait jouer cinq sets en Coupe Davis, il fallait être capable den faire dix à lentraînement. On sétait préparés dans ce sens-là.
Le titre de 1996, prolongement de celui de 1991
Pour moi, 1996 est dans la continuité de 1991, où javais eu le plaisir dêtre dans léquipe de France, dêtre remplaçant (dans les quatre joueurs). Javais eu la chance de vivre cette victoire fantastique. Depuis cette victoire, jai toujours eu le rêve de réaliser la même chose que Guy (Forget), cest-à-dire apporter le point décisif pour mon équipe et mon pays, en réussissant à gérer la pression. Quand je suis rentré sur le court pour disputer ce cinquième match décisif, je nétais pas vraiment stressé. Car javais rêvé de cet instant cinq ans auparavant. Finalement, quand le moment de jouer de cinquième match est arrivé, je me sentais à ma place. Javais attendu ce moment. Jétais là où je voulais être.
Les fameuses trois balles de match sauvées
Au moment où jai eu ces trois balles de match contre moi, je me disais que jallais faire perdre tout le monde. Que cétait triste
Et en même temps, je me disais que javais fait tout ce que javais pu. Après avoir eu cette pensée, je nai plus rien lâché. Jai alors vu Yannick Noah dépité sur le banc qui sest mis à y croire lui aussi. Il ma dit « allez Arnaud, rien nest perdu. Il faut prendre point après point ». Je voyais également tous mes amis dans les gradins, le staff, le public… Rien que pour eux, il fallait le faire. Je me rappelle que jai également pensé à mon fils. Jai alors sauvé la première balle de match, puis la deuxième puis la troisième
Et les choses ont tourné. Le bonheur de la victoire est décuplé après un tel scénario. Jai eu le sentiment dêtre rescapé, chanceux et privilégié. Jai réussi à survivre à ça et dapporter ce bonheur à toute léquipe.
Un cinquième match au scénario incroyable
De ce match, je garde en moi le souvenir dune boule démotions, de plaisir et dénergie mêlée dune souffrance physique et mentale, ainsi que dune immense joie. Je ne veux pas spécialement décortiquer ce match car cest plein de perceptions amalgamées. Cest un truc incroyable, un rêve atteint. Cette victoire est toujours en moi. Cest fantastique, cest un beau cadeau.
Ce nest que récemment que jai revu ce match en cassette. Je navais pas envie de le regarder avant car je voulais préserver ce bonheur en moi. En visionnant le match, jétais fier de voir quà certains moments, javais bien géré le match.
Laprès-victoire
La fête était finalement assez bizarre. A Malmö, tout était fermé après la rencontre. Le dîner officiel avait débuté à une heure du matin pour se terminer à 3 heures. On na donc pas vraiment eu de fête après en Suède. Cest plutôt à Paris quelle a eu lieu. Mais cétait déjà quelques jours après. On était fatigués. Nous navons pas fait de grandes fiestas. Cétait finalement très contenu, noble. Sinon, on avait défilé sur les Champs-Elysées, cétait fabuleux ! Quand on nous avait prévenu que nous allions aller sur les Champs, javais dit Mais vous êtes fou, il y aura dix personnes. Finalement, il y a eu plein de monde. Cétait incroyable. Puis, il y a également eu la réception à lElysée, très sympa.
Le plus grand moment d’une carrière
Il sagit incontestablement du plus grand moment de ma carrière. Cest aussi le début de plein de choses. Ma carrière personnelle ma apporté également de magnifiques moments, mais faire partie de cette équipe donnait une dimension supplémentaire. Il y avait également le plaisir dêtre avec les copains pour gravir ces montagnes. La Coupe Davis a servi ma carrière personnelle. Elle ma permis de grandir, de devenir quelquun de bien. Cest une expérience unique.
Nicolas Bonnet (FFT)