Clermont affronte le Stade Français, tombeur surprise de Toulon, en finale du Top 14, ce soir au Stade de France. Le club auvergnat est favori mais a la fâcheuse habitude de perdre très souvent ses finales. Le club parisien, qui ne s’imaginait pas à pareille fête, tentera d’en profiter à domicile.
Peu importe qui autour de 23h00 soulèvera le Bouclier de Brennus pour devenir le 116e champion de France, il flottera sur Saint-Denis un parfum de revanche sur l’histoire, la petite comme la grande. Les almanachs rappellent que les deux équipes s’étaient déjà affrontées pour l’épilogue de la saison en 2007, au profit d’un club parisien (23-18) alors au faîte de sa gloire. Scénario cruel alors pour l’ASM, renversée dans les dernières minutes. Mais aussi début d’un cycle, car Clermont est ensuite obstinément revenu en finale (2008, 2009) pour enfin remporter un titre national en 2010. Davantage tournée vers la Coupe d’Europe ces dernières années, l’ASM regarde de nouveau ses frontières intérieures, après avoir buté trois fois en demies et une fois en barrages depuis son seul sacre en date. Dans le même temps, le Stade Français a déroulé une pièce en trois actes: décadence, souffrance, renaissance. Le club de Max Guazzini et ses treize Boucliers a en effet peu à peu sombré, au point de se retrouver sur le fil de l’abime au début de l’été 2011, menacé de faillite. Repris par la famille Savare qui a injecté ces quatre dernières années quelque 30 millions d’euros sans s’épargner quelques tourments sportifs, le Stade Français est ressuscité et retrouve huit ans après l’air des sommets.
Clermont favori malgré les blessés
Cette finale, c’est donc un pied de nez aux années noires pour Paris, et l’occasion de faire un bras d’honneur pour Clermont, agacé par cette réputation de perdant qui lui colle à la peau comme le sparadrap du capitaine Haddock. C’est assez de ressasser ces dix finales de championnat perdues depuis 1936, mais aussi les deux de Coupes d’Europe cédées à Toulon en 2013 et 2015. Le retour de Twickenham début mai, après une nouvelle désillusion contre le RCT (24-18), a fait gronder plus qu’à l’accoutumée chez les supporters: les hommes de Franck Azéma sont donc sommés de revenir les bras chargés de bois place de Jaude dimanche. Ils ont pour eux la force de l’expérience des matches-couperets, un parcours solide tout au long de la saison régulière (2e) et une défense de fer, la meilleure du championnat. Azéma, qui a pris les pleins pouvoirs cette saison après avoir été l’adjoint de Vern Cotter, a aussi montré sa poigne en privilégiant la politique de l’homme en forme. En demies contre Toulouse (18-14), le talonneur Benjamin Kayser avait été prié de s’asseoir sur le banc tandis que l’emblématique troisième ligne Julien Bonnaire, l’ailier Napolioni Nalaga et le pilier Vincent Debaty n’avaient même pas été retenus. Reste désormais à insuffler ce pragmatisme à l’équipe qui déplore des blessures dans la dernière ligne droite, entre le deuxième ligne Jamie Cudmore, les centres Wesley Fofana et Jonathan Davies et l’ailier Noa Nakaitaci.
Au vécu auvergnat, le Stade Français opposera le vent de fraîcheur qui l’a porté d’un bout à l’autre de la saison, jusqu’à s’adjuger la 4e place du championnat, balayer le Racing-Métro en barrages (38-15) et déboulonner le tenant du titre Toulon en demies (33-16). Fidèles à leur philosophie, les hommes de Gonzalo Quesada pratiquent un jeu vivifiant, bercé par les alizés du large mais d’abord assis sur une conquête de fer.