Trente ans après le virage historique du professionnalisme, le rugby français vacille sur ses bases. Dans un rapport accablant publié ce vendredi, la chambre régionale des comptes d’Occitanie alerte sur un modèle « structurellement déficitaire » et sur la fragilité des ponts entre rugby pro et amateur. Clubs endettés, dépendance aux mécènes et subventions publiques mal encadrées : l’équilibre paraît plus fragile que jamais.
Les chiffres donnent le vertige : 6,8 millions d’euros de déficit pour Castres en 2023, 5,9 pour Montpellier, 1,8 pour l’USAP… Seul le Stade Toulousain surnage, avec un chiffre d’affaires hors norme et un résultat net excédentaire de 2,6 millions d’euros. Sa stratégie de diversification — merchandising, exploitation du stade, recettes hors jours de match — est montrée en exemple, alors que la masse salariale explose partout (+46 % à Montauban depuis 2019).
Pour les magistrats, la dépendance aux actionnaires privés et aux subventions publiques atteint un niveau préoccupant. Le cas Montpellier illustre cette dérive : Altrad a effacé 31,8 millions de dettes en cinq ans. Dans ce contexte, la solidarité censée irriguer le rugby amateur se retrouve parfois inversée, avec des associations appelées à soutenir les équipes pros. La Cour plaide pour une gouvernance renforcée et un recentrage clair des financements publics sur l’éducation et l’insertion, afin d’éviter que l’édifice ne s’écroule.