Redevenu indispensable au XV de France, opposé à l’Irlande dimanche en Coupe du monde, Louis Picamoles a en partie attribué mercredi son renouveau à une nouvelle philosophie, travaillée avec un préparateur mental, qui lui permet de beaucoup moins (se prendre) la tête.
Les Irlandais disent craindre particulièrement votre puissance. Cela
fait-il plaisir d’être de nouveau un joueur redouté ?
Louis Picamoles : Plaisir, je ne dirais pas… Entre ce qu’il se dit et ce qu’on pense il y a toujours une nuance.
Mais cela doit vous faire plaisir d’avoir retrouvé votre forme physique après votre longue absence en début de saison dernière en raison d’une pneumopathie…
Heureusement, sinon quelque chose n’irait pas. Oui, je suis content de faire partie de ce groupe, d’avoir fait les efforts nécessaires qui m’ont permis d’être là. Maintenant, je ne me satisfais pas de ça et je continue à bosser pour continuer à progresser et être encore plus performant.
L’encadrement vous reprochait de trop vous reposer sur votre puissance.
Comment avez-vous trouvé le juste équilibre entre avancer et jouer derrière
vous ?
L’un peut très bien fonctionner avec l’autre. Chaque match est aussi différent: l’adversaire, parfois, va forcer un petit peu à jouer d’une façon plus que d’une autre. Mais, là où j’ai peut-être un petit peu changé, c’est sur l’adaptation : je m’adapte un peu mieux à ce que va me proposer l’adversaire, ce qui fait que je vais peut-être mieux jouer certaines situations que par le passé. Mais je ne pense pas non plus avoir changé mon jeu radicalement.
Vous mettez-vous aussi moins la pression, comme lors de la Coupe du
monde 2011 ?
Ça, c’est sûr.
Comment avez-vous évolué dans ce domaine ?
Ce sont plein de choses. Les petits soucis physiques qui me sont arrivés en début de saison me permettent aussi de relativiser certaines choses et de plus savourer les moments que je passe ici, plutôt que de me torturer le cerveau avec des questions un peu futiles et inutiles qui pouvaient me bouffer un peu d’énergie. J’essaie juste d’être heureux d’être là, d’en profiter un maximum et, quand je suis sur le terrain, de m’éclater et de prendre du plaisir avec les copains. Et je vois que, depuis que j’ai changé de philosophie, je me sens mieux. Même quand il y a des matches où je suis moins bien, je me prends beaucoup moins la tête qu’avant, ce qui me permet de mieux rebondir derrière.
Comment se manifestait cette pression ?
C’est une façon de parler, je ne me torturais pas non plus. C’est surtout sur le terrain : aujourd’hui, si je fais un en-avant, je ne vais pas en rigoler mais ça va me glisser dessus et je vais de suite penser à ce qu’il faut que je fasse de bien pour rattraper ça. Alors qu’avant, peut-être que je pensais encore sur le ballon suivant à cet en-avant. Je me disais : il faut surtout pas que je fasse un en-avant. Ce sont des petits trucs comme ça qui font que parfois, au lieu de rebondir, on s’enfonce un peu.
Une mauvaise action pouvait vous faire sortir de votre match ?
Oui, il y a eu une période où la première action pouvait influer sur mon match entier, dans un sens comme dans l’autre.
La confiance de l’encadrement est-elle aussi importante dans cette évolution ?
Oui, bien sûr, j’ai besoin de ça pour me sentir à l’aise et m’exprimer comme il faut. Mais je l’ai déjà eue par le passé et je n’ai pas toujours fait ce qu’il fallait pour rester (dans l’équipe). (Ces erreurs) m’ont aussi fait grandir et me permettent de savoir ce que je dois faire pour que cette confiance dure et que je puisse continuer à m’épanouir sur le terrain.
Est-ce aussi dû à l’expérience acquise, l’âge aidant ?
L’expérience, oui. Je bosse aussi avec un mec mentalement à Toulouse depuis deux ans, avec qui je continue d’échanger ici. Il m’a appris à gérer les scénarios qui peuvent arriver sur une rencontre, les préparer en amont du
match pour que, quel que soit le scénario, j’aie la réponse.
Propos recueillis par l’AFP