Ambassadeur de Booking.com, sponsor de l’UEFA Euro 2020, Marcel Desailly explique pourquoi l’Équipe de France est favorite de ce championnat d’Europe.
Le champion du monde 1998 explique également comment sa génération a remporté ce trophée en 2000. Dans cet entretien, il est aussi question de son ami, Didier Deschamps et du retour de Karim Benzema chez les Bleus. C’est parti pour une interview exclusive !
L’Equipe de France est favorite de cet Euro, le sacre mondial en 2018 a tout changé ?
MD : C’est une évidence et les Bleus de 2021 se doivent d’assumer ce statut. Ils sont champions du monde en ayant fait un parcours de qualité. Il y a un talent énorme dans cette génération, plus que la nôtre génération même si on avait Zidane. Il y a cette insouciance alors que nous notre groupe avait plus de maturité. J’avais 32 ans lors de l’Euro 2000 alors que là ils ont 20, 24 voir 28 pour certains. Cette insouciance va enlever la pression qu’ils peuvent avoir avec ce statut de favoris.
Ne sommes-nous pas en train de refaire la même erreur qu’en 2002 lorsque la France a été éliminée dès le premier tour de la Coupe du monde par excès de confiance ?
MD : Non, parce que c’était le début de la fin d’une génération. Tout a démarré par la non-qualification à la Coupe du monde 1994. En 1996, une nouvelle génération arrive, demi-finaliste à l’Euro puis vainqueur de la Coupe du monde en 1998, du championnat d’Europe en 2000 et deux coupes des confédérations en 2001 et 2003. Après, il y a la fin d’une génération avec des joueurs qui ont dépassé la trentaine, la même chose en 2004 où on est éliminé en quart de finale. Les sept, huit leaders de l’Équipe étaient proches de la fin de leur carrière. Aujourd’hui, ce n’est pas pareil, ils sont dans la phase ascendante de leur carrière et ils arriveront à gérer leur stress.
Depuis la prise de fonction de fonction de Didier Deschamps, le groupe France semble uni. Pourquoi est-ce si important dans une compétition internationale ?
MD : Ça fait la différence, à l’image de l’Espagne qui a réussi à remporter l’ Euro 2008, la Coupe du monde 2010 et l’Euro 2012. L’Equipe de France a développé la culture de la gagne et ça rapproche. Il y a également un facteur important dans cette équipe, chacun a connu des moments difficiles au sein de son club. Quand ils se retrouvent en Équipe de France, il y a la culture de la gagne, de la considération et une énergie positive qui se diffuse. Chacun d’entre eux va donner le maximum. On peut citer Paul Pogba, quand il arrive en bleu, il retrouve un statut très élevé, la confiance du coach, de l’équipe et ça lui permet sur le terrain de faire des efforts que peut-être il ne ferait pas. Ça peut porter à confusion car les observateurs vont se dire, il choisit ses matchs, son équipe. Mais non ! C’est quelque chose que l’on ne peut pas quantifier, on porte le maillot de l’Équipe de France, c’est une dynamique différente.
Des joueurs comme Jules Koundé ou Léo Dubois vont vivre leur première grande compétition, comment gère-t-on la pression car ils ont tout à prouver ?
MD : Ils n’ont pas eu l’occasion de s’affirmer avec ce maillot donc ils se doivent d’être concentrés. Oui, il y a le fun en dehors du terrain, il faut s’intégrer au groupe mais il faut surtout rester dans l’intensité aux entraînements afin d’évacuer rapidement le stress quand ils seront amenés à être sur le terrain. Didier Deschamps les a pris donc ce sont des joueurs de haut niveau. Mais on ne sait pas encore s’ils ont le niveau international. Ils doivent se créer un statut dans cette Équipe de France alors que tous les autres n’ont plus ce stress-là. Ils doivent encore prouver, c’est un challenge car combien de joueurs appelés en Equipe de France dans la période où j’étais, qui étaient exceptionnels en club, n’ont pas confirmé en Bleus. En Équipe de France, le stress, l’adrénaline et les coéquipier ne sont pas les mêmes, pas plus que les automatismes. Cela agit négativement sur la performance.
Didier Deschamps a su s’adapter aux joueurs qu’il a à sa disposition alors que ces prédécesseurs, Laurent Blanc ou Raymond Domenech, n’ont pas réussi. Comment est-ce qu’on l’explique ?
MD : En mettant Benzema à côté de Mbappé, il réajuste son équipe ce qui va insuffler une nouvelle énergie et c’est la où il va être fort. Comme en 2018 où il met Pogba à côté de Kanté. Il a cette capacité a mettre les joueurs dans les meilleurs conditions. Après, il y a des cycles, Laurent Blanc en 2012 ça n’a pas marché malheureusement même si la génération était bonne avec Samir Nasri ou Franck Ribéry. Puis Domenech qui a rencontré des difficultés mais il a emmené cette équipe en finale de Coupe du monde. Puis Didier est arrivé et ça a marché. C’est la magie du sport, il y a des cycles.
Justement, cinq ans après, Didier Deschamps sélectionne Karim Benzema pour l’Euro 2020, une bonne nouvelle pour le secteur offensif de l’Equipe de France ?
MD : A un certain niveau, les entraîneurs veulent gagner et pour cela il faut les meilleurs joueurs. Didier Deschamps a vu que devant, son équipe avait des difficultés. Olivier Giroud ne joue pas en club. Ben Yedder ne connait pas ce niveau. Faire jouer Mbappé seul devant ça ne marche pas. Benzema, sur ces trois ou quatre dernières années, a prouvé qu’il pouvait être une valeur ajoutée a ce collectif. Didier Deschamps a simplement fait ce qu’il devait faire en tant que sélectionneur. Il faut croire aux joueurs.