Le 20 juin 2010, Raymond Domenech, sélectionneur de l’équipe de France, s’avance vers les journalistes présents au centre d’entraînement des Bleus à Knysna en Afrique du Sud. En moins de 2 minutes, juste après la lecture de cette lettre, l’équipe de France attire les yeux du Monde. Les joueurs réalisent une grève, le paquebot « Bleus » est en plein naufrage.
« Ce jour-là, je sentais qu’il se préparait quelque chose. Au déjeuner, j’ai dit en rigolant : « J’espère qu’ils ne vont pas faire la grève de l’entraînement. » Mon staff a éclaté de rire, c’était tellement improbable. J’ai essayé de pêcher les infos, j’ai parlé avec Hugo Lloris, qui m’a dit avant de partir à l’entraînement : « On va faire une connerie. » « Et alors ? » « Ben, coach, vous savez, c’est l’équipe. » Dans le bus, avant l’entraînement, j’ai dit aux joueurs : « Je ne sais pas ce que vous allez faire mais il y a des caméras. Tout va être disséqué, soyez vigilants. J’espère que vous n’avez pas oublié qu’on est là pour jouer une Coupe du monde. » », a indiqué l’ancien sélectionneur dans L’Equipe. Avant de poursuivre : « Patrice Évra descend le dernier, la lettre à la main. « Coach, il faut que je vous voie. » On se met derrière le bus pour ne pas être vus par les journalistes alignés sur la colline. Il me donne la lettre. J’ai presque honte de ma première pensée : ce n’est pas eux qu’ils l’ont écrite, il n’y a pas de fautes d’orthographe. Rétrospectivement, c’est cela qui est le plus grave : quelqu’un censé avoir la tête sur les épaules leur a écrit ce courrier, c’est ahurissant. Je lui ai dit : « Mais vous êtes fous ! Vous êtes réellement fous ! » J’ai essayé de le convaincre. Il m’a souvent dit par la suite : « J’ai essayé aussi. » (…) Les responsables, ce sont ces indécis qui s’en foutaient. »
Enfin Raymond Domenech affirme : « Il y a une chose importante : Laurent Banc avait signé son contrat pendant notre stage de préparation avant la Coupe du monde. Pour les joueurs, ça change des choses, ça désinhibe. Après, prendre la décision de lire la lettre, c’est une erreur totale. Ce n’était pas à moi d’assumer leurs responsabilités. J’ai manqué de lucidité. En fait, je me suis posé, comme je le fais souvent, c’est ma nature, en responsable de tout. Je ne sais pas qui a écrit cette lettre, je n’ai même pas cherché à savoir. Cela fait dix ans et rien n’a filtré sur cette affaire. Il y a une sorte d’union sacrée très rare dans le foot. Ce jour-là, des personnes savaient et je regrette que certains agents qui m’appelaient tous les jours avant la liste pour me parler de leurs joueurs n’aient pas eu le courage de me prévenir. »