Petit tour d’horizon du nouvel appel d’offre lancé par l’UEFA, qui pourrait bien faire basculer l’avenir de la Ligue des champions en France.
L’UEFA a lancé, ces derniers jours, son nouvel appel d’offres mondial pour la diffusion de la Ligue des champions à partir de la saison 2027-2028. Un document dense de 180 pages, transmis aux médias intéressés par l’agence américaine Relevent, qui marque un tournant historique dans la stratégie de commercialisation des droits télévisés de la plus prestigieuse compétition européenne. Objectif : séduire un géant du numérique et franchir la barre symbolique des 5 milliards d’euros de revenus annuels.
Un lot mondial inédit
Pour attirer ces nouveaux acteurs, l’UEFA a conçu un lot spécial, le « lot A », permettant à une plateforme d’acquérir les droits d’un match phare diffusé simultanément dans le monde entier. Ce lot inclut 17 affiches du mardi soir, la finale de la Ligue des champions, ainsi que la Supercoupe d’Europe. Mais le choix des rencontres devra répondre à des règles strictes : pendant la phase de ligue, aucun club ne pourra être sélectionné plus d’une fois, et un décompte par pays limitera la surreprésentation des grands championnats.
À partir des quarts de finale, la liberté sera totale. Le diffuseur mondial disposera également d’options éditoriales, comme la création d’un magazine hebdomadaire dédié à la compétition.
L’exception américaine
Ce lot mondial n’inclut toutefois pas les droits en anglais aux États-Unis, déjà attribués à Paramount jusqu’en 2030. La firme américaine, via sa plateforme Paramount+, pourrait toutefois se positionner sur les autres territoires. Mais la bataille s’annonce féroce : Netflix, Amazon et Apple figurent parmi les candidats potentiels pour ce droit exclusif.
Un enjeu crucial, puisque le marché américain reste l’un des plus lucratifs pour l’UEFA. Si Paramount ne se positionne pas, le montant global du lot A pourrait être revu à la baisse. Dans chaque soumission, les diffuseurs devront par ailleurs indiquer les territoires où ils souhaitent exploiter la C1. En France, la finale restera diffusée gratuitement sur la TNT, conformément à la loi sur les événements d’importance majeure.
Canal+ menacé par la nouvelle donne
Diffuseur de 100 % des compétitions européennes jusqu’en 2027, Canal+ voit cette réforme d’un mauvais œil. Le groupe français, qui débourse environ 480 millions d’euros par saison, pourrait perdre le monopole d’une rencontre clé chaque mardi soir si le lot global trouve preneur.
« Le paysage audiovisuel est en pleine évolution », explique Guy-Laurent Epstein, directeur marketing de l’UEFA, dans L’Équipe. « Il y a aujourd’hui des plateformes de streaming mondiales très présentes. On ne pouvait pas se permettre de ne pas regarder ça. »
Une bataille à plusieurs milliards
Les diffuseurs ont jusqu’au 18 novembre pour soumettre leurs offres. L’UEFA arbitrera ensuite entre le montant global d’une offre mondiale et la somme des marchés locaux. « Le prix sera important, nous avons besoin que ce lot contribue de façon significative aux revenus globaux », précise Epstein.
L’UEFA impose également des garde-fous pour éviter la répétition des affiches. « On ne pourra pas choisir dix fois le PSG ou le Real Madrid durant la phase de ligue, mais une seule fois chacun », ajoute le dirigeant. De quoi renforcer la valeur des autres lots et inciter les diffuseurs nationaux à maintenir des offres élevées.
Canal+ sous pression, mais pas résigné
Cette ouverture vers les géants du numérique représente une menace directe pour Canal+, mais l’UEFA assume pleinement son choix. « Canal+ est puissant et sait ce qu’il a à faire », conclut Epstein. « On ne le froisse pas : on s’adapte à un marché où Netflix, Prime Video et les autres sont déjà des concurrents quotidiens. »
Entre stratégie d’expansion et adaptation à de nouveaux usages, cette réforme de la Ligue des champions pourrait redessiner, à partir de 2027, le visage du football télévisé mondial.


