Le sélectionneur anglais Stuart Lancaster, sans références au plus haut niveau lors de sa nomination à la surprise générale fin 2011, est le coupable désigné de l’élimination de l’Angleterre de sa Coupe du monde. Jamais un pays organisateur n’avait été éliminé dès le 1er tour.
Stuart Lancaster avait jusque-là bénéficié d’une certaine mansuétude de la presse britannique et de ses dirigeants qui, dès octobre 2014, ont prolongé son contrat jusqu’en 2020 malgré l’absence de victoire finale dans le Tournoi des six nations. Ils ont été séduits par le projet de cet ancien prof de gym, joueur de bon niveau à Leeds mais jamais international. Et qui, avant son intronisation comme sélectionneur par intérim à l’automne de 2011 à 42 ans, alors que l’expérimenté Nick Mallett avait postulé, n’avait entraîné que Leeds et les Saxons, la réserve du XV de la Rose.
Son mandat avait pourtant bien commencé. Lancaster a d’entrée imposé son autorité et son style à la tête d’une sélection qui sortait d’une Coupe du monde 2011 calamiteuse sur le plan sportif (élimination en quarts de finale par la France) et surtout marquée des scandales extrasportifs. Dès sa prise de fonction, il a fait table rase de l’ère Martin Johnson, capitaine des champions du monde 2003. Il met l’accent sur la fierté de porter le maillot national, les responsabilités qui en découlent et la nécessité d’éviter toute arrogance. Sportivement, il prend également des risques avec des décisions fortes, écartant des cadres comme Mike Tindall et lançant dans le grand bain dès le Tournoi 2012 une nouvelle génération menée par Chris Robshaw, qui ne comptait qu’une seule sélection lorsque Lancaster lui a confié le capitanat. De la même façon, il n’a pas hésité plus récemment à faire confiance aux jeunes Anthony Watson, George Ford ou Jonathan Joseph. Cela a payé grâce à un jeu attractif. Et les dirigeants de la Fédération anglaise lui ont confié la mission de guider le XV de la Rose à la victoire à domicile lors de la Coupe du monde avant, donc, de le prolonger jusqu’en 2020.
Il a cependant toujours manqué à l’Angleterre de Lancaster un petit quelque chose pour décrocher la victoire dans le Tournoi. A un succès de décrocher le Grand Chelem en 2013, le XV de la Rose s’était par exemple effondré lors du dernier match au pays de Galles (3-30). Et les quelques critiques sur son impuissance à gagner les grands matches sont revenues après la défaite face… au pays de Galles samedi (28-25) qui a précipité la chute de l’empire anglais.
En cause, son choix d’aligner à Twickenham une équipe plutôt défensive (Farrell à l’ouverture; Burgess-Barritt, paire inédite au centre) pour contrer la puissance galloise au centre au lieu d’imposer son jeu et, pendant le match, le remplacement de Sam Burgess par George Ford, ce qui a déstabilisé la ligne de défense. Will Carling, qui détient le record de capitanats à la tête de l’Angleterre, a aussi critiqué son management du groupe, comparant Lancaster à un professeur incapable de responsabiliser ses écoliers.
L’élimination prématurée met un terme abrupt à l’opération séduction mise en place avec cette Coupe du monde. Et les joueurs, s’ils ont été irréprochables en dehors du terrain cette fois, sont tombés dans l’excès inverse en se comportement comme des garçons inoffensifs. Le rugby anglais a plus de moyens, plus d’argent et plus de joueurs qu’aucune autre nation au monde. A Twickenham, les personnes qui s’occupent de la pelouse à la mi-temps portent le costume, pour l’amour du ciel, s’est emporté l’ancien deuxième ligne Paul Ackford. Malgré son contrat sécurisé pour plusieurs années encore, l’avenir de Lancaster à la tête du XV de la rose va s’inscrire en pointillé au cours des prochains jours.