Peu importe qu’elle s’appelle «affaire Valbuena», «affaire Benzema» ou «affaire de la sex-tape», le football français doit affronter un nouveau dossier épineux quand «l’affaire de Knysna» est à peine cicatrisée. Principal mis en cause, Karim Benzema bénéficie de la mansuétude de ses partenaires et de la Fédération française de football (FFF). A quelques mois de l’Euro 2016 (10 juin-10 juillet), le football français ne peut s’offrir le luxe d’éviter une prise de conscience.
Quel que soit son dénouement judiciaire, l’affaire Benzema est déjà une sale affaire pour le football français. Pour ses sponsors également, et pas uniquement ceux de l’attaquant vedette de l’équipe de France (81 sélections, 27 buts). L’intervention de Karim Benzema (27 ans) dans ce chantage, auprès d’un coéquipier de surcroît, est d’autant plus détestable qu’elle renvoie une image négative du football dont ses entreprises partenaires pensaient s’être débarrassée cinq ans après le naufrage de l’équipe de France en Afrique du Sud. Par prudence, les sponsors se murent dans le silence comme Adidas, l’équipementier personnel de l’attaquant du Real Madrid. D’autres préfèrent botter en touche en prétextant que c’est une affaire extra-football et que l’équipe de France n’est pas concernée. Les sponsors ne sont pas impliqués dans cette affaire. Le risque de transfert de valeurs négatives est faible. Cependant, ils se trompent lorsqu’ils affirment que l’équipe de France n’est pas concernée. C’est bien sûr tout le contraire. C’est lors d’un rassemblement des Bleus que Karim Benzema a parlé à Mathieu Valbuena (31 ans, 52 sélections, 8 buts). C’est aussi parce que les deux hommes sont essentiels à l’équipe de Didier Deschamps que le sélectionneur se retrouve à devoir inventer une nouvelle formule à quelques mois de l’Euro.
Pour l’instant, le milieu de terrain de l’Olympique Lyonnais et l’attaquant du Real Madrid ne peuvent jouer ensemble à cause des conditions du contrôle judiciaire imposé au second, mis en examen pour complicité de tentative de chantage et participation à une association de malfaiteurs. Mais même si sa situation judiciaire évoluait d’ici l’Euro, les deux hommes seraient-ils capables d’être coéquipiers après un tel déballage ?
Une situation à trancher et sans ambiguïté
Il n’y aura plus de rassemblement des Bleus avant le 25 mars aux Pays-Bas. Deschamps et la FFF ont botté en touche jusqu’à présent, espérant une éclaircie dans la tempête pour rappeler Benzema sous le maillot bleu. Le sélectionneur n’est effectivement pas dans l’urgence de trancher. Mais comment arriverait-il à justifier de maintenir sa confiance à un joueur qui, en termes d’image et d’éthique, vient de contrevenir à tout ce qui a été mis en place depuis Knysna ? Sa présence au sein des Bleus compliquerait leur vie. La situation serait intenable avec des spectateurs le sifflant à chaque apparition. Sportivement, l’équipe de France n’a déjà aucune marge lui assurant de réussir son Euro. Didier Deschamps serait mal inspiré de se rajouter une pression supplémentaire.
Jusqu’ici, la Fédération française de football et son président Noël Le Graët s’étaient abrités derrière la présomption d’innocence, oubliant au passage Mathieu Valbuena, la vraie victime. Mais la pression est encore montée d’un cran après les accusations du Lyonnais et la FFF a, enfin, décidé de se porter partie civile, ce qui va lui permettre d’avoir accès au dossier et préfigure d’éventuelles sanctions.