La France et l’Allemagne, victorieuses respectivement du Nigeria 2-0 et de l’Algérie 2-1 (a.p.), se retrouveront en quart de finale de la Coupe du monde pour une affiche qui dépasse le cadre du sport. La simple évocation de ce duel fait resurgir des souvenirs…
France-Allemagne c’est d’abord ce 8 juillet 1982 à Séville. Une demi-finale d’anthologie. La dramaturgie de ce match a nourri de nombreux ouvrages et documentaires télévisés. Aucun film au monde, aucune pièce ne saurait transmettre autant d’émotions que la demi-finale perdue de Séville. Michel Platini parle toujours avec émotion de cette demi-finale du Mondial 1982, entrée dans la légende du sport. Il y a 32 ans, la France a mené 3-1 en prolongation, Harald Schumacher commit un véritable attentat sur le défenseur Patrick Battiston, Maxime Bossis rata le dernier tir au but et la France fut inconsolable après l’élimination des Bleus (3-3 a.p., 5 t.a.b. à 4) pour ce qui était encore la RFA. Je souffre encore en rameutant ces images dans mon esprit, Séville, pour moi, c’est une nuit noire, a confié à l’AFP pour les 30 ans de ce match, il y a deux ans, Michel Hidalgo, sélectionneur de l’équipe de France de 1976 à 1984. L’image choc remonte à la 57e minute, lorsque la tête de Battiston est percutée de plein fouet par la hanche du gardien allemand sorti des ses cages délibérément sur le Français. Le joueur de Saint-Etienne tombe lourdement comme un pantin désarticulé sur la pelouse. Etendu sur le sol, inanimé, deux dents en moins, Battiston fait craindre le pire. Il sort sur une civière, la main glissée dans celle de son capitaine Platini. Schumacher, lui, n’est sanctionné ni d’un coup franc ni d’un carton et ne prend pas la peine de s’enquérir de l’état de santé de sa victime. Mon arbitre-assistant m’a dit, qu’à son avis, ce n’était pas intentionnel, assure Charles Corver, l’arbitre néerlandais interrogé au moment des 30 ans de ce match. La demi-finale du défenseur stéphanois aura duré exactement sept minutes. Le temps de remplacer Bernard Genghini à la 50e minute, d’être lancé par Michel Platini, de tenter un lob du gauche et d’être percuté violemment par Schumacher. Une fissure d’une vertèbre cervicale et des fractures aux dents, voilà ce qui me reste encore aujourd’hui de cette agression, énumère Battiston, en plus de cette déclaration surréaliste prononcée par l’Allemand à l’issue de la rencontre. S’il a deux dents de cassées, je vais lui en payer en or. L’action revient lors de chaque France-Allemagne. C’est comme ça. Ce qui s’est passé en 1982, on m’en reparle à chaque fois. Mais il n’y a pas eu que ça dans la dramaturgie de Séville, feint Battiston aujourd’hui.
Parmi les autres séquences de cette rencontre disputé sur le terrain du stade Sanchez Pizjuan, il y a celles du but avec la volée de Marius Trésor dans la prolongation (92e), puis la joie extatique d’Alain Giresse qui a porté le score à 3-1 (98e). La France pense alors avoir un pied et quatre orteils en finale. Jusqu’à la réduction du score pour l’Allemagne de l’Ouest de Karl Heinz Rummenigge (102e) et l’égalisation de Klaus Fischer (108e). Et puis, vient le coup de grâce avec l’épreuve des tirs au but. Les larmes d’Ulrich Stielike, qui avait buté sur Jean-Luc Ettori, furent séchées par Schumacher, bourreau des Français en arrêtant les tentatives de Didier Six et de Bossis, genou à terre et chaussettes baissées.
Quant à Hidalgo, une dernière image le hante: Je n’ai jamais vu des vestiaires comme ça après le match. C’était presque la maternelle avec des pleurs. Il y a deux joueurs, je n’ai jamais dit leur nom, qu’on a été obligé de mettre tout habillés sous la douche, ils n’arrivaient pas à se déshabiller.
Quatre ans plus tard au Mondial au Mexique, Français et Allemands se retrouveront encore. Schumacher était encore dans les buts des Allemands. Toujours en demi-finale. Mais avec Platini diminué par une blessure récurrente à un tendon d’Achille, et après un match d’anthologie en quart de finale contre le Brésil (1-1, 4-3 t.a.b.), les Bleus passent à côté du match. Joël Bats commet une faute de main sur un coup franc de Brehme, et les Bleus subissent un nouveau revers (2-0). La génération Platini ne sera championne du monde, trouvant toujours l’Allemagne sur son chemin.