Romain Bardet (AG2R La Mondiale) avoue avoir remporté la 19e étape du Tour de France sans stratégie prédéfinie. Le nouveau dauphin de Chris Froome dit avoir attaqué à l’instinct.
Votre attaque était-elle préméditée ?
Pas du tout. C’était vraiment à l’instinct, c’est le vélo plaisir que l’on veut pratiquer, celui qui procure les plus belles émotions. Mika Chérel m’a mis la puce à l’oreille aujourd’hui. On est soumis à beaucoup de pression et on a besoin de capitaines de route comme Sam (Dumoulin) et Mika, qui prennent les décisions. J’ai su tout de suite que c’était une bonne idée.
Comment avez-vous procédé dans la dernière montée ?
Je savais avoir de bonnes jambes après le contre-la-montre. J’ai cherché à reprendre des repères sensoriels. Je me doutais que si je tenais un bon rythme, les autres auraient du mal à venir me chercher. Rui Costa ne passait pas un relais, j’espérais un peu de collaboration sur la partie de la montée qui n’était pas vraiment favorable. Mais je n’ai pas tergiversé comme au Dauphiné. On apprend de ses erreurs. Cette fois, je visais le (classement) général et l’étape est venue en plus. J’avais prévu d’attaquer dans la partie la plus pentue qui me correspondait bien. Les 5 derniers kilomètres ont été un peu longs. 9,8 kilomètres d’ascension, pour un seul homme, c’est long !
Quelles sensations avez-vous ressenti ?
C’était fabuleux. Je n’avais pas d’informations, c’était au feeling. J’avais l’impression d’avoir le vent dans le dos avec ce public, je sentais beaucoup d’émotions de la part des spectateurs et je pense que ça m’a transcendé. Je me suis dit ‘donne le meilleur, il ne faut rien avoir à regretter’. On souffre assez sur le vélo. Quand on a les circonstances favorables, il faut en profiter. Je ne savais pas quels étaient les écarts, je veux juste sortir des calculs qui nous brident en cours et laisser la part aux émotions, on en a besoin.
Chris Froome est maillot jaune avec 4 minutes 11 d’avance sur vous. Gagner le Tour est-il possible ?
C’est très compliqué. Froome est plus que solide. Je ne sais pas ce qui s’est passé derrière, je n’ai pas eu d’information. On m’a dit que c’était serré pour le podium. Dans Joux-Plane (samedi), tout peut se passer. Il faudra être à la hauteur. Je vais penser d’abord à sauver une place sur le podium à Paris. C’est très serré et c’est ce qui rend la course passionnante. Je ne vais pas prendre de risques, j’en ai pris assez aujourd’hui. Mais je veux d’abord savourer et prendre les choses comme elles viennent. L’an dernier, j’avais surtout pensé à défendre le maillot à pois et je n’avais pas dormi de la nuit.